Epouser l’étranger

February 27th, 2014 Posted by Express yourself
L’autre jour j’ai participé à un mariage, à Naples. Une de mes meilleures copines, et son amoureux ont décidé légaliser leur union – première partie à Naples, deuxième à Buenos Aires. Oui, c’est un mariage en étapes de célébrations. Spécial, n’est pas ?
Et leur histoire aussi : elle est napolitaine d’origine, mais une vrai jet set par passion et profession, lui, argentin. Les deux journalistes. Oui, vous avez raison, ce n’est pas le scenario traditionnel ou l’époux et l’épouse viens de familles alliées, enracinées dans une société bien posée, ou on connait la couleur de la jupe de la tante de notre cousin depuis la nuit de temps. Non, c’était pas arrangé, ils n’habitaient même pas dans la même ville, ni sur le même continent. Ils se sont rencontrés dans un programme de formation, à Chile et ont décidé continuer leurs amour, leurs recherches et leurs écritures ensemble, en plein mode nomade avant de se poser à Buenos Aires.
 
Quel meilleur set de kick starter un tel mariage que Naples, avec toutes ses histoires de cœur et passion, des voyages, et races croisées?  Pendant 3000 ans, les napolitains ont tout eu et tout vecu : de l’éruption de Vésuve jusque à la bonanza impériale, des lumières des premières universités d’Europe médiévale, jusqu’au ravages de mafia. Les napolitains vivent ensemble, dépositaire de ces cultures qui ont touché leur évolution : grecque,  romane, arabe, germanique, française, espagnole, américaine et bien d’autres. La création même de cette ville est liée à l’amour qui tente de dépasser les limites du probable: selon la légende, la sirène Parthénope s’éprend d’Ulysse mais, dédaignée par celui-ci, elle se jette dans la mer. Parait-il qu’un temple fut construit dans la ville de Néapolis (nom antique de Napoli), et les habitants célébraient des jeux gymniques en son honneur. Elle fut tellement respectée et aimée, qu’on adapta son histoire jusqu’au point ou il y a des versions plus récentes selon les quelles la sirène tomba amoureuse de la ville, et décida d’y continuer sa vie, en laissant tomber tous ses confrères tritons & sirènes.  
 
Au-delà de la joie, et de l’enthousiasme qui accompagne toute histoire d’amour sur son chemin, il y a une confirmation et la promesse d’une époque avec moins de barrières. On était assis autour des tables, et ça avait l’aire d’être un Babylon pacifique et content: les invités venaient de tout le monde, Moscow, Chicago, Quito, Buenos Aires, Londres, vous nommez la ville, probablement il y en avait un ou deux résidents entre nous ; il y en avait aussi quelques nomades sans résidence, internationalement éparpille entre bourses d’étude postuniversitaires, projets de recherches et autre missions à l’étranger. Les mixes à découvrir étaient fascinantes : Ethiopien Canadian, Chilien – Français, Indien, Argentin, Roumain, Italiens (du nord et du sud), Anglais – Italien, bref, du tout ;  et presque toutes les croyances présentes : chrétiens, juifs, musulmans, bouddhistes, adorateurs du Soleil… peut être même quelques nihilistes cachés derrière de sourires provoqués par l’occasion. Hyper mixe, on parlait toutes les langues, et les phrases volaient dans tous les sens, colorés avec des expressions de toutes les cultures. Et on était à l’aise. Bizarrement mais on s’entendait bien, ventant de tout le monde, et partant en toutes les directions.
 
On n’est pas les seuls d’ailleurs. Vous aussi, peut-être, avez-vous assisté à un mariage pareil ? Ou le baptême d’un petit nous-nous, comme on appelle les métisses au Maroc ?   Ou peut-être, vous avez un cousin second dégrée de Suède, pale come une chandelle qui danse zoulou comme les dieux de feux matérialisés ? Ou bien une tante de Bretagne, épouse du cher oncle Moud, qui adore le henné et le porte à toute occasion, y inclut le Noel ; ou, au moins, pendant vos études aux Etas Unis vous avez flirté avec un charmant John de Kentucky qui aurait chanté all day long Fela Kuti, presque jurant qu’il est la réincarnation du génie d’Afro beat.
 
Diversifier les perspectives, tester des nouveaux horizons, s’ouvrir au monde et embrasser l’humanité avec son cœur : au-delà de toute différence, on peut s’assoir autour d’une table, et célébrer ensemble. Bin pourquoi pas vivre ensemble ?
 
Fin baromètre social, le mariage a changé en quelque sorte, en s’adaptant à cette vie du XXIème siècle, à ce processus d’ouverture et amalgamation qui correspond à une époque de voyages et révolutions de social media. Mais il reste toujours au centre autour duquel tourne toute la vie d’une communauté. Là se rencontrent les vivants, les morts et les «non-encore-nés». Et tant mieux, si cette communauté peut s’ouvrir et devenir internationale. A la fin, ce n’est pas qu’accepter du point de vue rationnel les différences, mais aussi trouver la manière de les intégrer dans notre système, en harmonie – qu’il soit temps d’éruption ou bonanza. Et finalement, si on arrive à aimer quelqu’un ou quelque chose, il y en a plus de chances de le comprendre profondément.
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